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le Dernier des Hommes

LE DERNIER des HOMMES

***

1. Des couleurs dans la nuit.

Le petit garçon relâcha d’un coup une des pales qu’il tenait fermement serrée entre ses petits doigts. L’eau frappa le fin morceau de bambou et les pales se mirent à tourner de plus en plus vite, entrainées par la force du courant. Il battit des mains, heureux de sa réalisation.

Il avait au préalable patiemment creusé un canal en parallèle au petit ruisseau. A la pente, à peine plus marquée, s’ajoutait le rétrécissement du cours d’eau, donnant plus de vitesse à l’eau. Puis il avait installé cette roue à cinq pales sur laquelle il travaillait depuis le début de la semaine, une demi-heure chaque soir, après avoir rédigé ses devoirs l’esprit ailleurs.

Le garçonnet resta immobile pendant quelques minutes. La force du courant faisait tourner avec une belle régularité l’ersatz de moulin dans un clapotis délicieux. Des éclaboussures parvenaient jusque sur ses mocassins usés jusqu’à la corde. Le gamin portait des culottes courtes été comme hiver, il ne craignait pas le froid. Sa peau était idéalement hâlée par des journées passées au soleil. L’école du village lâchait ses pensionnaires en fin d’après midi mais il restait bien une heure ou deux pour gambader au dehors pendant l’été. L’hiver, c’était autre chose. Le vent ébouriffait une tête blonde.

Ce moulin était toute sa fierté. Pour la première fois de sa vie, il avait réalisé quelque chose de ses propres mains, ne s’était pas contenté de grimper en vainqueur aux arbres qui tendaient leurs branches noueuses comme une invitation. Un sentiment de satisfaction que la cueillette de baies n’avait jusque-là jamais provoqué. Il se sentait déjà un homme puisqu’il avait réussi à dompter la nature, du moins un filet d’eau. Il avait détourné une force gâchée en la transformant en une force motrice et rien ne l’empêcherait maintenant d’y fixer un ruban de cuivre pour produire de l’électricité.

Il avait souvent entendu les grands parler d’énergie propre, de réchauffement climatique, d’extinction massive d’espèces, de disparition de la biodiversité, de ressources qui s’épuisent. Cela le passionnait même s’il ne comprenait pas tout. Les mots étaient démesurément longs et ardus à prononcer, les concepts dépassaient largement l’entendement d’un garçonnet de sept ans. Cette projection dans l’avenir ne résonnait pas à ses oreilles. Il est paradoxal de constater que, plus l’on vieillit, plus on se sent concerné par l’avenir alors que notre nombre d’années à passer sur la Terre s’amenuise de plus en plus.

Allongé dans l’herbe tendre de la rive droite du ruisseau chantant, le petit garçon contemplait les pales de son moulin tourner avec la régularité d’un métronome, envoyant gicler des gouttelettes d’eau dans la lumière déclinante du soir. Les ombres s’étaient allongées, les chants des oiseaux s’étaient atténués comme la rumeur d’une foule qui se disperse, l’air devenait plus mordant. Il tressaillit mais n’avait aucune envie de rentrer à la maison. Il savait pourtant que le diner allait être servi d’une minute à l’autre et que, s’il était en retard, ça pourrait chauffer pour ses oreilles. Il se sentait étrangement bien, là, à admirer son mécanisme qui tournait inlassablement sans la moindre anicroche. Il bascula sur le dos et examina le ciel dont le bleu s’intensifiait lentement pour finir par devenir noir d’encre. Une première étoile fit son apparition sans qu’il puisse déterminer le moment exact où elle était apparue. Un instant plus tôt, le ciel était vide, le moment d’après elle scintillait faiblement. Le petit garçon savait parfaitement que les étoiles sont dans le ciel même en plein jour mais qu’on ne peut pas les voir comme on ne peut rien observer lorsqu’on se tient du mauvais côté d’un miroir sans teint. Il savait aussi que le soleil disparaissait à la nuit tombante parce que la Terre tournait sur elle-même et que la course de l’astre du matin au soir n’était qu’un effet d’optique comme dans ces dessins que leur avait montré leur instituteur lors d’un cours de dessin particulièrement passionnant. Vus sous un certain angle, ils prenaient l’aspect d’un objet en trois dimensions, une automobile par exemple ou bien un chalet en rondins, mais si on disposait les dessins différemment, ils s’aplatissaient tel un ballon qui se dégonfle. Il ne se souvenait plus du terme exact. Ana-quelque chose.

Le petit garçon savait toutes ces choses mais était toujours contrarié de ne pas pouvoir observer l’instant où une étoile s’illuminait. Il en avait parlé à son instituteur et celui-ci lui avait répondu qu’il était impossible de déterminer lorsqu’une étoile était visible à l’œil nu. Il lui avait donné en exemple l’arc-en-ciel : on ne pouvait jamais le traverser. L’enfant n’était pas convaincu et cherchait toujours à essayer de découvrir cet instant magique où la première étoile s’allumait dans le ciel s‘obscurcissant. Après tout, il lui était arrivé d’apercevoir des étoiles filantes au cœur de l’été mais, là encore, il savait que ces illuminations n’étaient pas des étoiles mais des objets bien plus petits qui s’enflammaient en traversant l’atmosphère terrestre comme deux morceaux de silex produisent des étincelles lorsqu’ils sont frappés entre eux. Tout frottement engendre une chaleur.

Les yeux fixés sur l’immensité du ciel, le petit garçon imaginait les galaxies lointaines qui s’allumaient les unes après les autres sous ses yeux ébahis. Il s’inventait des systèmes solaires à deux soleils (les plus répandus dans l’univers avait-il lu) et des planètes tournant autour de ces systèmes ambivalents dans des courbes sinusoïdales d’une beauté sans égale. Un ballet se déroulait sous ses yeux et dans sa tête, les étoiles elles-mêmes se mettant à onduler dans des trajectoires régies par des équations mathématiques tellement complexes que même les plus grands chercheurs ne sauraient les résoudre.

Alors il la vit.

Une lueur orangée, mâtinée de reflets verdâtres, courut depuis l’horizon jusqu’au milieu du firmament. Des filaments se tordaient en changeant de teinte comme les longs cheveux de Natacha lorsqu’une brise délicate les faisait onduler. Le petit garçon n’en croyait pas ses yeux. Il pensait rêver comme il lui arrivait parfois lorsqu’il découvrait des formes bizarres dans les nuages rebondis de Juillet : un bestiaire de créatures monstrueuses peuplait le ciel. Pourtant tout était bien réel en cette soirée si peu commune. Les illuminations apparaissaient on ne savait d’où, un peu à la façon qu’on les étoiles de s’allumer sans qu’on s’en rende compte. Les longs filaments traversaient le ciel, se gonflant telle une baudruche ou se désagrégeant en milliers de fils comme lorsqu’une fusée de feu d’artifice vient à exploser, répandant des milliers de couleurs dans la noirceur du ciel. Parfois ces dessins s’évanouissaient comme si quelqu’un avait mouché la flamme d’une bougie. Le petit garçon n’avait jamais assisté à un tel spectacle. S’il avait eu l’esprit ténébreux, il aurait sans doute pensé assister à la fin du monde mais le garçonnet était la candeur incarnée et il se réjouissait d’un tel tableau qu’il pensait être le seul à contempler. Et peut-être était-ce le cas.

2. Nous ne sommes peut-être pas seuls.

Arizona. Le désert à perte de vue. Les journées d’été la température flirte avec les quarante degrés, la nuit elle tombe souvent au-dessous de zéro. Le ciel est d’une pureté irréelle. La route, rectiligne, puisque aucune rivière, aucune colline, pas la moindre butte ne l’oblige à effectuer des contournements, semble ne s’arrêter qu’à l’horizon. De hautes grilles bordent son côté ouest sur quelques kilomètres. Un haut portail à digicode en empêche l’accès au simple des mortels. De toute manière, personne n’aurait l’idée de venir se perdre dans cette zone inhospitalière à moins d’être un crotale ou un scorpion. La berline noire stoppe devant la grille. Personne n’en descend. Aucune vitre teintée ne s’abaisse. A l’intérieur, un homme en costume sombre de la meilleure coupe pianote sur son smartphone d’un index agile. Le voyant rouge du digicode passe au vert une demi seconde puis, sans un bruit, le portail glisse lentement, laissant passer l’imposante Audi.

Le véhicule emprunte une allée tracée au milieu de nulle part et recouverte de plaques de béton. Le système de suspensions ultra sophistiqué efface les secousses à chaque jointure. Les occupants ne ressentent pas la moindre secousse. Le chauffeur arbore une tenue militaire, à ses côtés un homme au visage carré semble aux aguets. Il a tout du garde du corps et c’est effectivement sa fonction. Il doit veiller à la sécurité de l’homme au costume impeccable assis sur la banquette arrière, se sacrifier pour lui si besoin est. Ce n’est pas sa première mission. Cet agent surentrainé, rompu à tous les exercices de défense, a été choisi pour son sang froid et son expérience des situations dangereuses. Pourtant, depuis qu’il est au service de cet homme, il n’a jamais eu à intervenir.

A l’arrière, l’homme au complet parfait s’impatiente sans le montrer plus qu’en tapotant de l’index et du majeur un épais dossier relié de cuir qu’il tient en équilibre sur ses genoux.

Une série de bâtiments semblés sortis de terre apparaissent  soudain à peine camouflés derrière une haie de buis. Il n’y a pas d’étage. Cinq structures aux façades de verre et d’acier et aux toits plats se composent en étoile. L’imposante berline allemande vient s’arrêter juste devant la seconde bâtisse. Aussitôt le bodyguard bondit de son siège et vient se poster devant la porte arrière gauche dont le chauffeur vient de commander l’ouverture par une simple pression sur l’écran tactile de l’ordinateur de bord et qui s’ouvre automatiquement. L’homme au dossier en cuir pose ses deux chaussures faites sur mesure sur le sol et aussitôt une bouffée d’air brûlant le frappe au visage.

- Saloperie de désert à la con, soupire-t-il.

Il suit l’agent de protection qui jette des coups d’œil rapides tout autour de lui à la façon des rapaces en quête de nourriture. Il n’y a cependant pas âme qui vive à cinquante kilomètres à la ronde. Parvenus devant un mur de verre strié de cinq tringles diagonales en acier, l’homme d’une élégance rare actionne à nouveau son smartphone. Le pan de mur reflétant leurs silhouettes sombres émet un faible déclic et bascule sur des gonds inexistants comme si un colosse avait soudainement enfoncé  le panneau en verre qui se met à coulisser toujours sans le moindre bruit. Les deux hommes pénétrèrent dans le sanctuaire. Aussitôt la climatisation leur offre à nouveau la température constante de vingt et un degrés centigrades.  Une lumière bleutée semble s’échapper du sol et laisse le sentiment de pénétrer dans une église futuriste.

L’agent de protection, sa fonction pour le moment suspendue, s’installe sur l’une des banquettes qui font face à quatre portes dont le dispositif d’ouverture est le même que le portail d’entrée et le sas de verre. L’homme actionne à nouveau son smartphone, la porte la plus à gauche bascule et il disparait dans une pièce ovale.

Une vingtaine de personnes sont assises devant des écrans, quasiment seule source d’éclairage de la pièce, davantage plongée dans la pénombre que le hall d’accueil. Personne ne se soucie de l’irruption de l’homme. Au mur en face, une gigantesque planisphère laisse clignoter quelques signaux de couleurs différentes. Il n’y a aucun bruit distinct, juste un ronronnement dont il est difficile de déterminer la source, peut-être le système de ventilation des ordinateurs. L’homme s’avance vers le milieu de la pièce, laissant trainer un regard ça et là, par-dessus les épaules de scientifiques penchés sur des notes, pianotant de temps en temps sur des claviers futuristes en forme de cercles ou simplement en utilisant leurs écrans comme tablettes tactiles. Un bataillon d’imprimantes crépitent faiblement, vomissant une suite ininterrompue de diagrammes et colonnes de chiffres à la manière des antiques fax des années 80.

Un jeune homme arborant un t-shirt vantant les mérites d’une prestigieuse université à demi caché par une chemise de bûcheron canadien et un jean qui aurait traversé en force un fourré de ronces et d’églantiers s’approche, une portion de pizza dans la main et la bouche pleine de plusieurs parts de quatre fromages aux relents caractéristiques qui parfument son haleine lorsqu’il prend la parole.

- ’é ou a ré pa yui au ouin inqueur  épa ini.

Devant la mine interloquée du visiteur, il déglutit péniblement, puis répète sa phrase en faisant un effort d’articulation.

- C’est fou! Ca n’arrête pas depuis  au moins cinq heures et c’est pas fini.

L’homme au costume plisse un coin de lèvre en signe de dégout. Ces génies de la science et de la physique l’ont toujours écoeuré avec leurs tenues de collégiens attardés, leur langage d’analphabètes lorsqu’il ne s’agit pas de données techniques, leur façon de se nourrir comme si leur estomac n’était qu’un tube qu’il fallait, de temps en temps, alimenter d’un hamburger, un hot dog, une pizza ou, au mieux, des chinoiseries commandées par le biais de leur téléphone cellulaire. Mais, en matière d’informatique et de physique moléculaire, d’astronomie appliquée et tout ces concepts qui échappent à l’entendement du citoyen lambda, ils étaient les meilleurs.

- A-t-on des précisions sur l’endroit d’émission? Peut-on décrypter un éventuel message? Où en sont les Chinois, les Russes, les Européens?

Un second spécialiste s’était avancé. Lui, au moins, avait fait l’effort d’enfiler une chemise digne de ce nom et avait la décence d’avoir terminé son repas quand il assura :

- On vient d’avoir Shanghai en visio. Leurs appareils ont enregistré la même chose que nous, évidemment. Francfort nous a appelé dès le début de l’événement et Moscou fait la sourde oreille, comme d’habitude.

Le premier post-adolescent à la chemise à carreaux rouges, reprit :

-  Nous nous activons pour trouver un éventuel code dans tout ce fatras. En fait, il semble qu’il n’y ait pas de message bien précis. Juste quelque chose qui voudrait dire : nous sommes là. Peut-être que c’est simplement une sorte de bonjour, une façon de klaxonner dans la rue pour indiquer sa présence, qu’on attend…

L’homme au costume n’avait jamais de sa vie klaxonné pour indiquer à un ami de venir le rejoindre.

- C’est un peu vague, je l’avoue. Quant à savoir d’où viennent ces signaux… C’est le flou total. Ca provient de partout, en fait.

- Comment ça, de partout? Il y a bien un endroit d’émission, même si c’est un relais.

- Ouais. En fait, on a plutôt l’impression qu’on serait au milieu du signal, comme si on baignait dedans.

- Alors, c’est peut-être simplement une tentative des russes pour faire diversion, non? Ils auraient pu envoyer eux-mêmes le signal.

- C’est ce que nous avons pensé au début reprit le technicien à la chemise blanche. Le silence de Moscou paraissait troublant. Et puis, comme le signal perdurait…

- Ce qui veut dire?

- Il nous est impossible à nous, terriens, de prolonger un tel signal, émettant un champ magnétique aussi puissant sur un tel laps de temps. Ca fait, il donne un rapide coup d’œil à une horloge plaquée au mur égrenant des chiffres digitaux rouges fluo, cinq heures et douze minutes que cela dure. Et ça ne faiblit pas.

- Que faut-il en conclure?

- Pour l’instant, on effectue des mesures, on cherche. Tout porte à croire que ce message, si message il y a, ressemble plus à un enregistrement (il fit le geste de parenthèses avec ses deux index et majeurs collés ensemble) qu’une onde radio qui se propagerait dans l’univers.

- Comment ça, un enregistrement?

- Hé bien, c’est un peu comme si on traversait une zone électromagnétique d’une ampleur inouïe, reprit celui qui avait dorénavant englouti le reste de sa pizza, effectivement aux quatre fromages d’après l’état de ses doigts. 

- Une éruption solaire, en quelque sorte?

- Oui, sauf que là, les experts sont formels : le soleil est dans une phase de grand calme. Donc, ça ne vient pas de ce côté.

L’homme en costume se gratta un menton pourtant rasé de frais. S’il y avait bien une chose qu’il détestait par-dessus tout c’était ces approximations, ces incertitudes, ces ambivalences qui naissaient à chaque nouvelle découverte. Il fallait être patient afin d’y voir plus clair. Mais le temps perdu en recherches, vérifications était autant de retard sur les concurrents. Car il ne fallait pas se voiler la face : le programme SETI (Search for Extra Terrestrial Intelligence) avait ses doubles un peu partout sur la planète, même si les autres gouvernements n’accordaient pas autant de budget à cette recherche d’un quelconque signe d’une intelligence venue d’ailleurs. Les américains étaient, une fois de plus, à la pointe de leur spécialité et il fallait que ça continue dans ces domaines si sensibles. Que l’industrie automobile fut supplantée par les Japonais puis, dorénavant, par les Coréens en attendant les Chinois dans l’avenir, cela ne portait pas à conséquence. C’était un recul, une perte de pouvoir certes, mais qui n’engageait pas un processus vital, mondial. En revanche, la découverte d’une forme de vie intelligente dépassait la simple fierté d’avoir posé les premiers un pied sur le sol lunaire. Cela garantissait d’être les interlocuteurs privilégiés avec… Avec on ne savait pas vraiment quoi, en réalité. Tout ce flou agaçait l’homme au costume sombre. Il avait des comptes rendus à faire au plus haut lieu et on ne se contenterait pas de simples hypothèses ou de vagues suppositions.

- En fait, on ne sait rien, c’est ça.

Les chercheurs ressemblèrent plus que jamais à une bande d’ados pris sur le fait. Un troisième technicien aux lunettes à monture en plastique et arborant un pull over à l’effigie de Bart Simpson s’avança. Il avait une voix plus posée, une autorité naturelle que son look désamorçait instantanément.

- Pour l’heure, on navigue dans le vague c’est vrai. Mais d’ici vingt quatre heures, on aura davantage de données à analyser, on pourra effectuer des recoupements. Peut-être qu’un message est glissé dans ce champ électromagnétique pour qu’il ne se corrompe pas en traversant d’autres lieux magnétiques ou à forte gravitation qui pourrait l’endommager. Mais pour l’instant, ça ressemble effectivement à un vent solaire extrêmement puissant. Ca affole d’ailleurs les processeurs, ce qui retarde d’autant le traitement des informations.

- Des ennuis au niveau électrique, électronique?

- Possible. Probable même. Nous n’avons pas encore atteint le pic, comme si la Terre traversait un banc de brouillard  qui s’intensifiait au fur et à mesure de son déplacement. Car, à la différence des vents solaires et autres champs électromagnétiques qui viennent bombarder notre atmosphère, cette fois c’est nous qui traversons un désordre magnétique. Nous connaissons parfaitement le principe des rayons cosmiques issus de l’explosion d’étoiles géantes, les supernovae. Ces flux de plasma constitués d’ions et d’électrons se répandent dans l’univers, traversant les planètes tout comme les vents solaires, les orages magnétiques. Ce qui nous préoccupe ici, c’est l’intensité du phénomène.

- N’y a-t-il pas une possibilité d’y échapper, un bouclier…

- Ces particules sont si fines qu’elles traversent absolument toute consistance moléculaire. Elles passent au travers des abris anti atomique si c’est ce que vous voulez me faire dire.

- Y a-t-il un danger pour la population?

- Absolument pas. Vous savez, ces particules bombardent la planète depuis l’aube des temps et tout le monde se porte bien. Elles ne causent qu’un dommage sur les êtres vivants en provoquant des lésions sur les chromosomes. Lors de la duplication cellulaire, elles affectent les brins d‘ADN.

- C’est grave ça, non?

- Primordial, je dirais. En modifiant certains caractères génétiques lors de la duplication, comme si on commettait des erreurs en recopiant un texte, cela permet d’apporter de nouvelles aptitudes, de se différencier des autres. La plupart du temps, cela ne porte pas à conséquence, mais il arrive qu’un détail change tout. Comme par exemple avoir davantage de poils si le climat se refroidit. Sans ces mutations génétiques, le monde vivant n’aurait jamais pu évoluer selon les découvertes de Darwin.

- Ah? Nous serions en train de bondir d’arbre en arbre, c’est ça?

- Même pas. Nous serions tous des bactéries se multipliant à l’infini mais sans espoir d’évoluer un jour ou l’autre.

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